La République Démocratique du Congo (RDC) est à nouveau en proie à la violence. Depuis la reprise de Goma et Bukavu, les deux grandes villes de l’Est par l’AFC-M23, les tensions intercommunautaires ont atteint un paroxysme, alimentées par un flot de discours de haine et de la désinformation. Les messages de haine se propagent sur les réseaux sociaux et plongent des milliers de citoyens dans la peur suite à des menaces et des actes de violences dirigées contre les membres de certaines communautés.
La désinformation est une arme puissante, capable de déboucher des rumeurs en des actes de violence et des soulèvements des communautés, les unes contre les autres. Qu’ils soient proférés en ligne ou hors ligne, les discours de haine et la désinformation incitent à la discrimination, à la violence et exacerbent les tensions entre des communautés qui vivaient pourtant en harmonie.
La Langue Swahili, un patrimoine africain
A ces jours, la RDC et particulièrement dans capitale Kinshasa, des appels à la violence sont lancés contre les personnes originaires de l’Est du pays parlant la langue Kiswahili/ Elles sont désignées comme traîtres et responsables de tous les maux que subit le pays.
Ces discours stigmatisant créent un climat de peur et de suspicion, terreau fertile pour la violence : des personnes sont agressées dans la capitale Congolaise. En date du 18 février 2025 un homme a été lynché à mort, rapporte un témoin oculaire à Kinshasa.
« Je suis arrivé au moment où les wewa (motards) tabassent, jetaient de pierres et criant Rwandais, Rwandais à ce monsieur que vous avez vu dans la vidéo affaibli et ensanglanté et qui a été sauvé de justesse par un agent de l’ordre. C’était une expérience horrible à voir en tant que ressortissant de l’Est. »
Les swahiliphones vivant à Kinshasa craignent pour leur vie. Ils évitent de parler la langue kiswahili, qui pourtant une langue nationale et internationale parlée dans plusieurs provinces de la RDC et dans plusieurs pays africains, ce qui prouve que la langue swahili n’est pas liée à une ethnie mais plutôt à des vastes ensembles géographiques étendus sur le continent Africain.
La conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) dans son communiqué du 22 février 2025 signé par son secrétaire Monseigneur Donatien NSHOLE se dit indignée et lance la sonnette d’alarme sur cette ségrégation qui risque d’embrasser les conflits intercommunautaires et enfoncer davantage notre pays dans les violences. La CENCO appelle à la maturité de toutes les communautés qui forment la nation congolaise à ne pas se laisser induire en erreur par ceux qui prêchent la division et la chasse aux swahiliphones, aux originaires de l’Est ou aux étrangers. Pour la CENCO, ces actes ne peuvent pas être l’expression du patriotisme et moins encore une voie de la paix pour notre pays.
Nadine KAMPIRE