La ville de Goma, en République démocratique du Congo, a accueilli une série d’activités culturelles et professionnelles dans le cadre de la 10ème édition du Festival Amani, une rencontre annuelle qui rassemble des artistes autour d’un concept fort :LA PAIX.
Organisé depuis maintenant 10 ans, le Festival Amani (qui signifie « paix » en swahili) s’est imposé comme un symbole de résilience dans une région ravagée par la guerre depuis trois décennies.
D’ordinaire prévu en février, l’édition 2024 a dû être reportée à plusieurs reprises en raison de la recrudescence des affrontements entre les rebelles du M23 et les forces loyalistes.
Depuis sa première édition en 2014, ce rendez-vous artistique se tient à Goma avec pour objectif de renforcer la cohésion sociale et de promouvoir la diversité culturelle dans une région déchirée par des conflits depuis trois décennies.
Cependant, au-delà des spectacles et des célébrations, le Festival Amani se veut un appel à l’union dans les efforts pour la paix. « C’est une opportunité pour chaque habitant de Goma d’interroger ce qu’il fait pour la restauration de la paix dans la région », insiste Guillaume Bisimwa, directeur de l’événement.
Pour Bony Nzanzu, membre de la cellule de communication, l’événement joue également un rôle crucial dans la résilience collective des victimes de la guerre. « Le festival rassemble les communautés et renforce leur capacité à surmonter les traumatismes. Cela reste un facteur décisif pour le retour à la paix », pense-t-il, satisfait de l’effectivité de l’évènement.
Changer l’image de Goma : une bataille pour la réputation
Dans une région dont l’image est souvent associée à la guerre et aux violences, le Festival Amani se positionne comme une occasion de raconter une autre histoire de Goma. Cet événement met en avant la résilience des habitants et célèbre le vivre-ensemble dans une ville multiculturelle.
Selon Jacinthe Maarifa, cet événement est une bouffée d’espoir : « Le festival est un point blanc dans l’obscurité qui représente aujourd’hui le Nord-Kivu. Il reflète le véritable désir des Gomatraciens : la paix et la tranquillité », confie l’artiste slameur, membre du collectif Goma Slam Session.
Pour d’autres artistes participants au festival, l’art devient une arme pacifique pour éveiller les consciences. Très célèbre pour ses morceaux engageants, le rappeur swahiliphone JKM Rambo inaugure sa prestation par des messages de sensibilisation avec un accent particulier sur des sujets d’actualité dans l’opinion publique congolaise, à savoir la révision de la constitution et la restauration de la paix dans l’Est de la RDC.
« En tant qu’artiste, je n’ai pas le temps pour des flatteries, je suis un messager et le peuple a un message clair aujourd’hui, il veut la paix », s’exclame-t-il dans une interview qu’il accorde à la presse après avoir littéralement « mis le feu » sur le village Ihusi, l’espace qui accueille l’évènement. Celui-ci affirme le rôle des artistes comme porte-voix des aspirations populaires.
Interrogé après sa prestation, Magic Pinokio estime que l’art va au-delà de la sensibilisation. Son rôle thérapeutique dans une région où le traumatisme collectif est omniprésent : « La culture permet à tous de guérir davantage », résume-t-il. Pour lui, les chansons, les danses et les spectacles deviennent des outils de détraumatisassions de masse, offrant un soulagement aux victimes de la violence.
Symbole de reconstruction
Depuis trois décennies, Goma subit les contrecoups d’une insécurité chronique. Malgré cela, le Festival Amani prouve que la culture peut être une arme de reconstruction massive, permettant aux communautés de se retrouver, d’espérer et de rêver d’un avenir meilleur. Face à une situation où la guerre semble omniprésente, la culture se dresse comme une force discrète mais puissante, capable de rassembler, de guérir et d’unir.
Joseph Katusele